Face au danger existentiel : sommes-nous tous conscients ?

Une nouvelle information est tombée hier matin, dans le village de Kut (Gegharkunik), les soldats azéris ont tiré sur les villageois et ont capturé un bon nombre d’animaux. Malheureusement, depuis un bon moment les nouvelles qui nous parviennent d’Arménie sont alarmantes et inquiétantes, les unes plus humiliantes que les autres. 

La semaine dernière 6 soldats arméniens sont capturés à l’intérieur des frontières de l’Arménie, à 7km de la frontière en direction de Sevan, dans le Guegharkounik. Cette information a été confirmée par le ministère de la Défense de la République d’Arménie.

Le lendemain, deux soldats se font tuer dans la même région. A Erevan, Nikol confirme les soupçons d’un nouvel accord où l’Arménie devrait céder des villages : il décrit cet accord comme étant «  non pas à 99% mais à 100% » dans l’intérêt de la nation arménienne. Plus tard le ministre des Affaires étrangères donnera sa démission en guise de contestation face à ce nouvel accord qui, d’après lui, va à l’encontre des intérêts de la nation. Notons qu’Ara Ayvazian a été désigné par Nikol après la démission de Zohrab Mnatsakanyan quelques jours après le 9 novembre, et cela puisqu’il n’a même pas été consulté par Nikol au sujet de l’accord ainsi que sa contenance. Hier, nous avons appris d’ailleurs la démission de la porte parole et de tous les vices-ministres des affaires étrangères.

Partant de là, j’aimerais partager quelques cartes et quelques distances et mesures, pour que l’on mesure la gravité de la situation, pour que l’on comprenne comment Nikol détruit définitivement l’Arménie en dénonçant l’inaction de la Russie alors même que l’armée arménienne n’a pas reçu l’ordre d’ouvrir le feu. 

3 cartes.

Carte n°1

1) Le fameux point 9 de l’accord du 9 novembre 2020, pour lequel Nikol n’a consulté personne, ni le président ni le ministère des Affaires étrangères. Il promet l’ouverture d’un corridor terrestre entre l’Azerbaïdjan et le Nakhitchevan, une terre arménienne qui connut le même sort que l’Artsakh. Staline l’a honteusement offerte aux azéris en 1920-21. Face à la polémique suscitée par le terme « corridor », Nikol se cache derrière des notions plus acceptables pour l’audience populaire : tantôt on entend « des voies de communications », tantôt « des voies ferrées » ces tournures aussi contiennent des menaces réelles, de la menace démographique dont l’Europe est otage, à la menace de la pénétration de la capitale turco-azéri à Erevan ce qui sera la fin de toute manœuvre politique. Pour rappel, si notre peuple a vécu un génocide, c’est bien pour contrer le rêve du panturquisme exprimé dans ce point 9 de l’accord. Or, depuis près d’un mois, l’armée azerbaïdjanaise a franchi notre frontière souveraine et internationalement reconnue. Ils ont ainsi avancé à plus de 7Km à l’intérieur des frontières arméniennes et on sait qu’ils fortifient leurs positions. 

Nous avons très rapidement assisté au nombre grandissant d’azéris qui pénètrent notre territoire national d’abord à 200, puis à 600, ensuite à 1000 soldats. Les menaces d’Aliyev de prendre le lac Sevan ou d’imposer un passage vers le Nakhitchevan par la force n’étaient donc pas des paroles en l’air. Le corridor de Nakhitchevan a une longueur de 24Km et l’ennemi en est déjà à presque la moitié de son chemin. Notons que l’armée du Nakhitchevan n’a pas participé à la guerre et donc se trouve dans un état opérationnel maximal, et qu’une avancée d’en bas avec la pénétration d’en haut réalisera le rêve du fameux passage à travers l’Arménie.

Carte n°2

2) Ce 25 Mai nous avons appris que deux de nos soldats sont tombés en martyr, et cela dans Verin Shorja. On sait aussi qu’ils sont tués par balles d’où l’utilisation du mot հրազենային dans le communiqué officiel du Ministère de la Défense. Cela signifie qu’ils se trouvaient à une distance approximative de 500-700 mètres des tireurs. Verin Shorja est à 100KM de Erevan et à 10 KM du lac Sevan… Ne soyons pas surpris de les voir nager dans le lac Sevan un de ces quatre matins. Et donc une question s’impose : en sachant qu’Aliyev veut Sevan et Erevan, pourquoi le gouvernement Pashinyan les laissent s’installer sur le territoire arménien ? Pour l’activation de l’accord de l’OTSC, les soldats arméniens doivent engager l’ennemi, et personne ne viendra nous protéger si on ne commence pas à le faire nous-même. Pourquoi garder une telle bombe à retardement si ce n’est peut-être pour pouvoir décaler ou annuler les élections du 20 juin.

Carte n°3

3) Cette dernière carte doit nous réveiller. Nous nous sommes laissés duper pendant les 44 jours de guerre, croyant naïvement le mensonge d’Etat : « nous gagnons/ nous allons gagner». Des militaires gradés expérimentés, des milliers de réservistes et des milliers d’hommes de la diaspora auraient pu joindre nos frères d’Artsakh dans la bataille. Quel est donc ce choix de communication ? A quoi cela rime de mentir à sa population pendant 44j puis de la jeter du haut d’une falaise le 45ème jour ? 

Personnellement, je ne connais aucun Arménien qui aurait refusé de donner sa vie pour préserver Chouchi et Surp Ghazanchetsots, les symboles de notre fierté commune. 

Cette carte expose la distance parcourue par l’ennemi qui a pénétré Jibrayil en montant par Hadrut, Fizuli pour mettre le pied à Chouchi pendant que le gouvernement arménien démentait encore la perte de Hadrut. En fait, il avait été perdu dans les dix premiers jours d’octobre. 

Même schéma pour la perte de Chouchi : nous l’avions perdu entre le 3 et le 4 novembre mais le gouvernement a une fois de plus, honteusement menti durant 5 jours. Nikol Pashinyan écrivait publiquement le 9 novembre que les combats pour Chouchi continuent. Il faut se faire à l’idée qu’avec le gouvernement en place, tous les scénarios les plus apocalyptiques, improbables, voire inimaginables pour un Arménien, sont susceptibles de se réaliser. Ne soyons pas emprisonnés dans nos rôles de spectateurs nonchalants. Deux autres éléments permettent d’ouvrir les yeux sur l’approche de Nikol et son gouvernement quant aux évènements de Syunik. L’un des seuls juristes formé et expérimenté (ce qui retire les doutes liées à son inaptitude ou à son amateurisme) confirme leur trahison. Il s’agit de Vladimir Vardanyan qui a déclaré que l’armée arménienne était là pour défendre « le peuple » et non des terrains vides, même si ces derniers se trouvent en Arménie. Un autre député du parti « Im Kayl », Vahé Ghalumyan déclare sans vergogne qu’une série de villages du Syunik et du Gegharkunik sont des territoires azerbaïdjanais… Curieux lorsque l’on sait que ce député n’est autre que le parrain de Nikol, Vahé Ghalumyan. Enfin, le gouvernement nous a menti à plusieurs reprises, nous cachant la pénétration ennemie de 60km sur le territoire arménien. Cela nous confirme qu’ils peuvent en faire de même pour les 15km restants pour le Nakhitchevan.

Après avoir pris en compte l’ensemble des éléments ci-dessus citées, quiconque soutenant encore la politique dévastatrice du gouvernement en place aux élections du 20 juin, se présente indéniablement comme complice. 

Nejteh Karakavorian